Bon, si vous êtes Parisiens, cette note ne va peut-être pas vous plaire , mais nous, chez ActuKiné, on adore ces gentils petits animaux dont on a beaucoup à apprendre*.

Ce mois-ci un des papiers choisi par l’éditeur en chef de PAIN concerne les effets de la douleur chronique neuropathique sur le système opioïde. Chez l’humain porteurs de douleurs chroniques, des études transversales ont déjà montré la baisse de disponibilité des récepteurs opioïdes mais avec deux limitations majeures :

– D’une part il est impossible de dire si ces changements sont dus à la douleur elle-même ou s’ils sont préexistants ou même induits par la prise de médicaments ;
– D’autre part on ne connait pas la base neurobiologique de cette baisse de disponibilité qui pourrait provenir d’une hausse de la libération d’opioïdes endogènes occupant les récepteurs, d’une baisse de l’expression des récepteurs opioïdes ou encore d’une baisse du nombre de neurones exprimant les opioïdes.

Une étude longitudinale à tâchée d’apporter des éléments de réponse à ces problématiques en comparant un groupe de rats subissant une chirurgie de section nerveuse périphérique (n=17 : aaahh c’est horrible !) et un groupe de rats subissant une chirurgie factice (n=17 : ouf !) – enfin bon, tout le monde mourrait à la fin.

Les critères de jugement retenus comportaient un testing sensitif, un test de la préférence au sucrose (mesure de l’anhédonie), une batterie de tests rimant en i : radiochimie(PET)/immunohistochimie/analyse en microscopie (évaluation de l’expression des récepteurs opioïdes mu). Ils étaient utilisés à une semaine puis à trois mois.

A 1 semaine et à 3 mois, la sensibilité mécanique et thermique (froid) est plus basse dans le groupe chirurgie réelle. L’analyse de différentes régions cérébrales in vivo et ex vivo montre une diminution de la disponibilité des récepteurs opioïdes mu dans le groupe chirurgie réelle. De plus, l’analyse tissulaire en immunohistochimie sur trois régions cérébrales montre l’absence de changement d’immunoréactivité pour les enképhalines et aucune différence du nombre de corps cellulaire neuronaux entre les groupes de rats. La préférence au sucrose augmente dans le groupe chirurgie factice mais baisse dans le groupe chirurgie réelle.

La conclusion des auteurs est donc que la douleur chronique conduit à la réduction de la disponibilité des récepteurs opioïdes mu au niveau de l’insula et du striatum. Cette baisse reflète une diminution de l’expression de ces récepteurs et est corrélée avec le test de préférence au sucrose ce qui pourrait soutenir l’hypothèse d’un état de dépression induite par la douleur.

Affaire à suivre chez une espèce soi-disant plus développée…

Références

Thompson, S. J., Pitcher, M. H., Stone, L. S., Tarum, F., Niu, G., Chen, X., … & Bushnell, M. C. (2018). Chronic neuropathic pain reduces opioid receptor availability with associated anhedonia in rat. Pain, 159(9), 1856-1866.

*bon d’accord, tout le monde sauf Jean-Luc…