Dans cette étude, les auteurs montrent qu’il existe une augmentation bilatérale de l’amplitude lors du test en Flexion latérale quand le ligament alaire présente une section d’un seul côté. 

Contexte: le side bending stress test est un test de screening pré-manipulatif réalisé pour évaluer l’instabilité du rachis cervical supérieur. A leur connaissance, il n’y a pas d’étude qui simule l’application de ce test avant et après section d’un ligament alaire tout en fixant C2.

Objectif: simuler l’effet de la section d’un ligament alaire sur le Stress Test en side bending pour une validation in vitro

Matériel et méthodes: 10 rachis cervicaux incluant la tête provenant de cadavre réfrigérés (9 hommes et 1 femme, moyenne d’âge 74 ans, variant de 63 à 85 ans) ont été examinés. Les spécimens utilisés ne présentaient pas de trace de chirurgie, de traumatisme, ou d’anomalie anatomique pouvant influencer les amplitudes articulaires. ils ne présentaient pas non plus de signes de maladies pouvant influencer le tissu conjonctif.

Procédures: 

  • Pour la préparation anatomique : il a été procédé à la désarticulation de C3 en coupant le disque intervertébral ainsi que les articulaires postérieures. Les muscles ont été retirés en prenant soin de ne pas léser le système ligamentaire. Le tronc cérébral, la moelle épinière et la membrane tectoriale furent retirés également pour découvrir le ligament alaire. La mandibule et le maxillaire supérieur ont été enlevés afin de poser des capteurs permettant l’enregistrement des mouvements induits par les mobilisations ainsi que la force utilisée. Une barre métallique était fixée sur le crâne en 3 points (cf. Photo issue de l’article). La tête a été placée en position neutre, C2 était fixée à l’aide d’une vis ensuite.
  • Pour les mobilisations: Chaque spécimen a été mobilisé quatre fois en FL. Les deux premières mobilisations furent utilisées comme échauffement pour limiter l’influence de la disco-élasticité des tissus mous. Toutes les mesures ont été enregistrées lors de la troisième mobilisation. Après section du ligament alaire, une dernière mobilisation était appliquée et enregistrée. Tous les mouvements ont été réalisé manuellement, dans le plan frontal (comme recommandé par Wylke et al., 1998). Le mouvement s’arrêtait lorsque le praticien percevait une résistance marquée.Toutes les mobilisations ont été réalisées par le même praticien qui avait plus de 15 ans d’expérience en thérapie manuelle.

Résultats: Lors de la FL droite, à l’exception d’un spécimen, les auteurs ont constaté une augmentation statistiquement significative de l’amplitude après section du ligament alaire droit (1.30°±1.54º en moyenne).

Lors de la FL gauche, tous les spécimens, excepté un, ont montré une augmentation statistiquement significative de l’amplitude en présence de la section du ligament alaire droit (1.88°±1.51° en moyenne).

Discussion: les auteurs rapportent que les résultats se rapprochent de ceux retrouvés dans la littérature; ils notent cependant que leur étude montre des amplitudes légèrement inférieures aux estimations in vitro de Panjabi et al. (2001) et légèrement supérieures aux mesures in vivo de Ishii et al. (2006). Ils attribuent cette différence au fait qu’ils sont les seuls à avoir réalisé ces mesures en fixant C2. Selon eux, la présence de FL au niveau du rachis cervical supérieur, bien que très limitée comme le montre leur étude, remet également en question les hypothèses associées aux tests de stabilité du ligament alaire (Pettman, 1994; Kaltenborn et al., 2012; Beeton, 1995) selon lesquelles aucune flexion latérale pure n’est possible avec fixation de C2 si les ligaments sont intacts.

La présente étude a révélé une augmentation de la flexion latérale ipsilatérale cervicale supérieure (33,5%) et de la flexion latérale controlatérale (27,5%) après la section unilatérale d’un ligament alaire. Les résultats de cette étude soutiennent le modèle de Crisco et al., (Crisco et al., 1991) qui prédit que la rupture d’un ligament alaire a un impact sur la stabilité de l’autre ligament alaire et entraînera une augmentation de la flexion latérale dans les deux directions.

Ils évoquent la résistance durant le test et montrent que, dans la plupart des spécimens, l’augmentation de l’ amplitude en flexion latérale a été produite avec la même force après dissection unilatérale du ligament alaire.

D’un point de vue clinique, il leur semblerait donc raisonnable que la résistance perçue lors d’une flexion latérale passive soit prise en compte lors du diagnostic de l’instabilité cervicale supérieure. Cependant, Il n’est pas établi qu’un clinicien puisse détecter une altération de la qualité du mouvement sur toute l’amplitude de mouvement, y compris dans le cadre d’une instabilité. L’augmentation de la résistance en fin de course pour quelques échantillons pourrait avoir été produite par d’autres structures telles que l’os contre l’os lorsque le système ligamentaire alaire est défaillant.

Les auteurs appellent à la prudence quant à l’extrapolation de ces données à un contexte clinique. La kinésiophobie, l’anxiété ou la protection musculaire peuvent également être présents et doivent être pris en compte lorsqu’un clinicien considère qu’un test de stress de flexion latérale est positif ( augmentation du mouvement ou diminution de la résistance)

Limites de l’étude: les conditions in vitro, la petite taille de l’échantillon, les variations anatomiques individuelles nombreuses de cette région.

Les résultats de cette étude soutiennent la notion que la présence de laxité du ligament alaire entraînera probablement une augmentation du mouvement dans les deux directions de flexion latérale. Cependant, la faible augmentation de mouvement, le fait que le mouvement augmente bilatéralement et le fait que cette étude ait été réalisée in vitro laissent planer un doute quant à l’utilité clinique du test .

Des recherche approfondies dans une population de patients avec suspicion d’instabilité cervicale sont donc nécessaires.

 

Réference :
Hidalgo-García, C., Lorente, A. I., Rodríguez-Sanz, J., Miguel TRICÁS-MORENO, J., Simon, M., Maza-Frechín, M., … Pérez-Bellmunt, A. (2020).
Effect of alar ligament transection in side-bending stress test: A cadaveric study. Musculoskeletal Science and Practice, 102110. doi:10.1016/j.msksp.2020.102110