Introduction :
L’évolution de la Broncho Pneumopathie Chronique Obstructive (BPCO) est caractérisée par une obstruction bronchique sévère, une hyperinflation pulmonaire et une insuffisance respiratoire chronique. Certaines conséquences de l’insuffisance respiratoire sont l’hypercapnie chronique et l’acidose respiratoire. La ventilation non invasive est le traitement de référence de l’acidose respiratoire hypercapnique. Malgré les effets positifs de la VNI en situation aigue, plusieurs essais randomisés (VNI avec oxygène VS oxygène seul) n’ont pas démontré l’efficacité de celle-ci sur la survie des patients à long terme.

Méthode :
Cette étude est un essai randomisé, contrôlé, prospective, multicentrique (36 unités pneumologiques Allemandes et Autrichiennes). Les patients inclus devaient être cliniquement stables (pas d’exacerbation durant les 4 semaines précédant la randomisation) avec une PaCO2  égale ou supérieure à 7 kPa, et un pH supérieur à 7,35. Les critères d’exclusions étaient : tous patients insuffisants respiratoires chroniques autres que les patients BPCO, patients obèses avec un IMC ≥35 kg/m2, comorbidités malignes, insuffisance cardiaque sévère (stade IV de la New York Heart Association), angor instable et arythmie sévère.
Les patients ont été randomisés en deux groupes :

  • un groupe intervention recevant les traitements habituels + VNI sur une durée de 6 heures par jour (de préférence la nuit, mais la ventilation de jour était acceptée)
  • un groupe témoin avec les traitements habituels mais ne recevant pas de VNI (la VNI était possible sur une courte durée si la PaCO2 devenait supérieure à 10 kPa à cause d’une exacerbation durant l’étude).

 
Les patients ont été suivis sur une période de 1 an avec des visites à j15, 3 mois, 6 mois, 9 mois et 12 mois.
Dans le groupe VNI, les patients ont été ventilés de façon contrôlée avec des pressions inspiratoires et une fréquence respiratoire élevées (IPAP moyenne à 22 cmH2O, Pep moyenne à 5 cmH2O, fréquence de sécurité moyenne à 16 c/min). Cependant, la ventilation assistée était également acceptée si les patients ne toléraient pas la fréquence de sécurité élevée.
Les réglages ont été adaptés afin de réduire la PaCO2 de 20 % ou plus, ou atteindre des valeurs de PaCO2 inférieures à 6,5 kPa.
Le critère de jugement principal était la mortalité.
Les critères de jugement secondaires étaient la gazométrie artérielle, le test de marche de 6 minutes et la qualité de vie.
Toutes les données de l’étude ont été analysées en aveugle par un opérateur indépendant.

Résultats :
195 patients ont été inclus. L’étude a dû être interrompue prématurément car celle-ci ne respectaient plus les dernières recommandations nationales Allemandes sur les modalités d’application de la VNI au long cours.
Pour le critère de jugement principal : la mortalité était de 12 % dans le groupe VNI contre 33% pour le groupe témoin (Hazard ratio à 0,24 ; IC : 0,11 – 0,49 p = 0,0004) à 1 an.
Des améliorations significatives du pH, de la SaO2, de la PaCO2, HCO3-  ont été observées en faveur du groupe VNI.
Aucune amélioration significative du test de marche de 6 minutes n’a été mise en évidence.
Une amélioration significative de la perception générale sur la santé du questionnaire SF-36 a été notée en faveur du groupe VNI. Une amélioration significative du questionnaire de Saint-George et du questionnaire « Severe Respiratory Insufficiency Questionnaire » a été constatée, toujours pour le groupe VNI.
 
Discussion et conclusion :
Cette étude est la première à mettre en avant l’impact de la VNI à long terme sur la mortalité des patients BPCO. Cette étude diffère avec les études précédentes qui n’ont pas démontré ces résultats. La différence de celle-ci par rapport aux autres essais serait l’application de niveaux de pressions bien plus importantes et une fréquence respiratoire de sécurité élevée. Cibler les niveaux de pressions afin de diminuer de 20% la PaCO2 ou atteindre une PaCO2 inférieure à 6,5 kPa semble améliorer la survie des patients sur le long terme. La plupart des patients toléraient une fréquence respiratoire de sécurité comprise entre 14 et 24 c/min. Des études dans l’avenir sont nécessaires pour évaluer l’influence de la VNI au long cours avec des niveaux de pressions élevés sur le système hémodynamique.

Abstract

Référence :
Köhnlein T, Windisch W, Köhler D, Drabik A, Geiseler J, Hartl S, Karg O, Laier-Groeneveld G, Nava S, Schönhofer B, Schucher B, Wegscheider K, Criée CP, Welte T.
Non-invasive positive pressure ventilation for the treatment of severe stable chronic obstructive pulmonary disease: a prospective, multicentre, randomised, controlled clinical trial.
Lancet Respir Med 2014 (9):698-705.