Introduction
 
L’intolérance à l’effort, la dyspnée, la diminution de la qualité de vie et les exacerbations sont les conséquences principales de la BPCO. Le réentrainement à l’effort est la composante principale de la réhabilitation respiratoire, et associe le renforcement en force et en endurance des membres inférieurs et supérieurs, ainsi que des muscles respiratoires.
 
Ces programmes permettent de diminuer les symptômes physiques et psychologiques liés à la maladie, avec une impact positif sur la santé publique (diminution des coûts liés à la prise en charge des exacerbations et des hospitalisations).
 
Mais différents profils de patients atteints de BPCO existent, et le programme de réentrainement doit être adapté, avec la possibilité de choisir différentes techniques et différentes modalités, toutes efficaces, mais plus ou moins évidentes à mettre en oeuvre.
 
Dans sa pratique quotidienne, il est important que le kinésithérapeute puisse proposer au patient un programme adapté, efficace, et cohérent avec la prescription médicale dont il dispose.
 
Cet article a pour objectif de résumer une revue de la littérature récente (1), à propos des différentes modalités possibles d’entrainement chez le patient BPCO. Les recommandations de la Société de Pneumologie de Langue Française (2) pourront être citées. Pour chaque modalité, un commentaire subjectif « En pratique » est proposé.
 
 
 
 
Entrainement en endurance continu

  • Pourquoi? Un réentrainement des membres inférieurs doit être réalisé chez le patient atteint de BPCO (G1+). Il est proposé d’associer des exercices d’endurance et de force des membres inférieurs (G2+) (2).
  • Pour qui? Les patients qui supportent une intensité d’effort continu > 60% de leur puissance maximale
  • Comment? Au moins 3 fois par semaine, 20 à 60 minutes, dyspnée d’effort cible entre 4 et 6 (échelle de Borg : un peu difficile / plus difficile)
  • En pratique : le plus simple à prescrire et à mettre en place, requiert de bonnes capacités à l’effort et idéalement la réalisation préalable d’une épreuve d’effort maximale (au minimum ECG d’effort)

 
Interval Training (IT)

  • Pourquoi? Adaptations musculaires au moins équivalentes à l’entrainement continu, avec une dyspnée moindre
  • Pour qui? Méthode intéressante pour les patients qui ne sont pas capables de soutenir une activité en endurance à haute intensité plus de 5 minutes (patients sévères), la phase de repos permet d’atteindre une charge de travail maximale sur les muscles périphériques sans stimuler le métabolisme anaérobie
  • Comment? Alterner haute intensité (20s à 3min) et basse intensité (30s à 3min)
  • En pratique : facile à prescrire et à mettre en place, de nombreuses modalités sont possibles, adaptés pour les personnes qui ne peuvent soutenir un plateau constant à la Fc cible d’entrainement.

 
Entrainement en résistance

  • Pourquoi? Efficacité comparable à l’entrainement en endurance, avec une dyspnée moindre
  • Pour qui? Pour tous les patients, mais surtout pour ceux qui sont limités à la réalisation de séances d’entraînement en endurance/IT
  • Comment? Avec tous types d’appareils et accessoires, visant membres inférieurs et supérieurs, pouvant reproduire des activités de la vie quotidienne. 1 à 3 séries de 8 à 12 répétitions, 2 à 3 fois par semaine, charge entre 60-70% de la 1RM.
  • En pratique : privilégier les outils simples (tubes élastiques, etc.) aux machines onéreuses et sophistiquées!

 
« Périodisation »

  • Pourquoi? L’entrainement périodisé non-linéaire est caractérisé par la modification fréquente et aléatoire des paramètres (intensité, durée et répétitions), afin d’optimiser les adaptations et de réduire les risques de surentraînement.
  • Pour qui? Pour les patients atteints de BPCO sévère
  • Comment? Entrainement aérobie (haut volume + basse intensité) associé à entrainement anaérobie (bas volume + moyenne/haute intensité)
  • En pratique : ne requiert pas de matériel spécialisé onéreux (machines, etc.), amélioration significative de tous les paramètres versus entrainement traditionnel, mais c’est une nouvelle méthode, résultats préliminaires pour l’instant, prescription beaucoup plus complexe (quantification, programme, progression, etc.)

 
Entrainement à une jambe

  • Pourquoi? L’entrainement sur une jambe en endurance à 35% de la puissance maximale provoque la même demande métabolique que sur 2 jambes à 70% de la Pmax (entrainement « classique »), mais avec une ventilation minute et une dyspnée plus faibles.
  • Pour qui? Pour les patients sévères.
  • Comment? Pédalage 15 minutes par jambe (30 minutes au total)
  • En pratique : pas spécialement évident à mettre en place, soit il faut pouvoir débrayer une pédale (limite matérielle), soit pouvoir placer son pied inactif au repos sur le cadre du vélo sans que cela ne gêne le pédalage.

 
Entrainement des muscles inspiratoires

  • Pourquoi? La faiblesse des muscles inspiratoires est associée à une dyspnée élevée, des troubles des échanges respiratoires et une tolérance à l’exercice réduite. Il est recommandé d’inclure un réentrainement des muscles inspiratoires chez les patients présentant une diminution objective de la force des muscles inspiratoires (G1+) (2)
  • Pour qui? Surtout indiqué à l’heure actuelle chez les patients qui ont une pression inspiratoire maximale (PImax) inférieure à 60cmH2O.
  • Comment? Utilisation d’un système de résistance à seuil à une résistance d’au moins 30% de la PImax (G2+) (2), les programmes sont variables (30 à 60 minutes par jour en 2 à 3 fois)
  • En pratique : différents dispositifs existent, patient unique ou non, plus ou moins onéreux, à résistance mécanique manuelle ou électronique. A noter, l’intérêt majeur des dispositifs de renforcement des muscles respiratoires en endurance par hyperventilation normocapnique, qui respectent la physiologie respiratoire, où le travail musculaire est augmenté par l’augmentation de la fréquence respiratoire, et non par une résistance externe.

 
Entrainement de la fonction d’équilibration

  • Pourquoi? Les déficits de la fonction d’équilibration et les altérations du contrôle postural sont associés à une augmentation du risque de chute et de la peur de la chute
  • Pour qui? Pour les patients BPCO à risque de chute
  • Comment? Un parcours complémentaire au programme standard associant des exercices d’équilibre et de transfert permet d’évaluer les scores d’évaluation de l’équilibre.
  • En pratique : étude préliminaire encourageante, qui respecte le principe assez basique d’adapter des exercices fonctionnels individualisés à chaque patient

 
Oxygénothérapie d’effort

  • Pourquoi? Désaturation à l’effort. La saturation à l’effort doit être supérieure ou égale à 90% (G2+) (2)
  • Pour qui? Pour les patients oxygéno-dépendants, mais aussi pour les patients non oxygéno-dépendants qui présentent une dyspnée importante à l’effort
  • Comment? Débit adaptable jusqu’à 6l/min, intéressant uniquement s’il y a une amélioration de la dyspnée à l’effort, ne doit pas être systématique, tous les patients ne sont pas répondeurs. Pas de problème d’hypercapnie, car la durée est courte.
  • En pratique : difficile à envisager en pratique libérale, d’autres modalités existent pour les patients les plus déconditionnés

 
Ventilation non-invasive

  • Pourquoi? La limitation du flux expiratoire et l’hyperinflation dynamique à l’effort augmentent le travail respiratoire et sont associées à une interruption précoce de l’effort, même à faible charge de travail. La VNI permet de diminuer le travail respiratoire.
  • Pour qui? Pour les patients sévères et très sévères, qui présentent une hyperinflation dynamique majeure et/ou une dyspnée très importante à l’effort
  • Comment? Utilisation d’un appareil à 2 niveaux de pression BiPAP (PEP réglée entre 4 et 8, AI entre 12 et 14), à adapter surtout en fonction du CONFORT du patient.
  • En pratique : à recommander chez un patient qui est déjà appareillé et qui a l’habitude d’utiliser la VNI, sinon la mise en place peut être compliquée et très chronophage.

 
 
Conclusion :
Le praticien a aujourd’hui la possibilité d’opter entre différentes modalités de réentrainement à l’effort, qui seront à choisir et à adapter en fonction de chaque patient. Bien que les programmes pourraient être débutés très précocement, en phase aigüe d’exacerbation, n’oublions pas que le plus important dans un programme de réhabilitation respiratoire, est, au final, le maintien des acquis à long terme. Ainsi, la réhabilitation respiratoire dans l’ensemble de ses composantes doit permettre à tous les patients de devenir acteurs et autonomes, ce qui est loin d’être gagné lorsqu’ils sont alignés dans nos services/cabinets en train de pédaler.
 
 
Références bibliographiques :
 
(1) Annemarie L Lee, Anne E Holland : Time to adapt exercise training regimens in pulmonary rehabilitation – a review of the literature. International Journal of COPD 2014 ; 9 : 1275-1288

 
(2) Recommandation pour la pratique clinique : prise en charge de la BPCO