Une publication a particulièrement retenu notre attention en juin :

van der Vlist AC, Winters M, Weir A, et al. Which treatment is most effective for patients with Achilles tendinopathy? A living systematic review with network meta-analysis of 29 randomised controlled trials [published online ahead of print, 2020 Jun 10]. Br J Sports Med. 2020;bjsports-2019-101872. doi:10.1136/bjsports-2019-101872

Et ce pour deux raisons :

La première est qu’elle utilise une méthode statistique peu fréquente, la network méta-analyse, et seconde est qu’elle conclue à la supériorité de l’acupuncture sur tous les autres traitements de la tendinopathie achiléenne.

Network méta-analyse

Cette approche est une autre façon d’améliorer l’étendue de la synthèse des preuves. Au lieu de se concentrer sur une question étroite avec une seule comparaison de traitement, une network méta-analyse  examine tous les traitements pour une condition ou une maladie donnée et toutes les comparaisons possibles entre eux. Le résultat annoncé n’est donc pas une taille d’effet comme dans une méta-analyse classique mais un ordre d’efficacité, chaque traitement obtenant un rang dans un classement du meilleur au moins bon. Pour étudier le mécanisme de traitement statistique, nous vous recommandons cet premier article :

Ioannidis J. Next-generation systematic reviews: prospective meta-analysis, individual-level data, networks and umbrella reviews. Br J Sports Med. 2017;51(20):1456-1458. doi:10.1136/bjsports-2017-097621

Ainsi que celui-ci qui dévoile les principes du traitement statistique (attention, cet article n’est lisible que par des personnes ayant un bon niveau de math, il utilise en effet des calculs matriciels) :

Salanti G, Higgins JP, Ades AE, Ioannidis JP. Evaluation of networks of randomized trials. Stat Methods Med Res. 2008;17(3):279-301. doi:10.1177/0962280207080643

Validité externe

Revenons à présent sur la conclusion de cette méta-analyse, l’acupuncture est le meilleur traitement pour la tendinopathie achiléenne chronique. Elle est surprenante car elle ne cadre pas tout à fait avec les autres publications sur l’exercice, le travail excentrique, les injections. On a donc là un problème de validité externe qui demande à creuser la question du pourquoi ce traitement arrive en tête de classement.

La méta-analyse repose comme toutes les méta-analyses sur le choix des essais cliniques qui seront intégrés dans le calcul statistique, et c’est là que se pose le problème. Suivant le type de sélection que vous faites, vous aurez des résultats différents. Bien que considérées comme les plus haut niveau de preuve, les méta-analyses restent critiquables et peuvent aussi raconter ce qu’elles veulent.

Sélection des articles

Dans cet article, 29 essais cliniques sont sélectionnés dont le critère principal de jugement est le score VISA. Les différents traitements qui la compose sont : exercices, injection, exercices+injections, ondes de chocs, wait and see, exercices et ondes de chocs et enfin acupuncture.

En y regardant de plus prêt, si chaque traitement correspond à plusieurs études, une seule étude est retenue pour l’acupuncture, c’est celle de Zang de 2012:

Zhang BM, Zhong LW, Xu SW, Jiang HR, Shen J. Acupuncture for chronic Achilles tendnopathy: a randomized controlled study. Chin J Integr Med. 2013;19(12):900-904. doi:10.1007/s11655-012-1218-4

Cette étude est classée à 6 sur l’échelle Pedro. En effet, ni les patients, ni les thérapeutes, ni les évaluateurs ne sont aveugles, ce n’est pas un essai en intention de traiter et le groupe contrôle (exercice) perd 5 sujets sur 32 soit pas loin de 20%. Les résultats sont spectaculaires, le score visa affiche une différence conséquente qui là non plus ne colle pas avec les tailles d’effets souvent faibles des techniques de rééducation. La méthodologie est donc très contestable et on comprend mieux pourquoi ce traitement arrive en tête au regard des autres approches.

Conclusion

Si la technique de la network méta-analyse est tout à fait intéressant, elle n’échappe pas dans sa construction aux biais de sélections des études cliniques sur lesquelles elle repose.