Introduction

Depuis quelques années, le territoire québécois commence à voir pousser de petites cliniques privées offrant comme service l’ostéopathie. L’ostéopathie se présente comme une médecine naturelle dite douce se basant uniquement sur la thérapie manuelle (1). À ce jour, aucune université canadienne n’offre un programme universitaire en ostéopathie. Toutefois, dans toutes les autres provinces canadiennes, le titre de D.O. (Doctor of osteopathic medicine) est protégé par le gouvernement (2). Ces D.O. canadiens ayant les mêmes privilèges que leur collègue MD doivent avoir reçu leur formation dans une université américaine. Aux États-Unis et au Canada anglais, les M.D. et les D.O. ont une licence illimitée pour la pratique de la médecine, les deux prescrivent de la médication, pratiquent la chirurgie et peuvent poursuivre leurs études dans n’importe quelles spécialités médicales reconnues (cardiologie, pneumologie, radiologie, etc.) (3,4,5). Plusieurs universités américaines offrent également des formations de cliniciens-chercheurs en offrant un diplôme de deuxième cycle (M.sc.) et/ou de troisième cycle (Ph.D.) conjointement au D.O. La différence entre les M.D. et les D.O. repose sur la philosophie de traitement, la connaissance du système musculo-squelettique et la pratique des traitements ostéopathiques manuels (OMT) (3). Environ 60 % des D.O. sont des généralistes, des internes, des pédiatres ou des gynécologues/obstétriciens (3). Les D.O. ont une approche globale de la santé et travaillent beaucoup en médecine préventive. Les D.O. sont généralement membre de l’American ostéopathique association (AOA). Au Canada, ils sont membres de la Canadian Osteopathic Association (COA) qui est en étroite relation avec l’AOA.

Au Québec, le titre de D.O. n’est pas protégé. Toutefois, l’article 14 du règlement du Collège des médecins du Québec permet que le diplôme de docteur en ostéopathie décerné dans une école de médecine ostéopathie aux États-Unis équivaille au diplôme de médecine pourvu que cette école soit agréée par la Comission on Osteopathic College Accreditation de l’AOA à la date ou le diplôme est décerné (6). À ce jour, selon le collège des médecins il n’y a aucun docteur en ostéopathie au Québec (7). Selon la COA, probablement que le fait de passer un examen de français a découragé la venue des ostéopathes américains (2). N’ayant donc aucune législation dans la belle province pour protéger les Docteurs de la médecine ostéopathique, plusieurs écoles d’ostéopathie privées ont vu le jour en décernant à leur étudiant le titre de D.O. (2). Ce titre usurper se décrit comme étant diplômé en ostéopathie par les écoles privées du Québec. Cette formation n’est toutefois pas chapeautée par le ministère de l’Éducation du Québec et varie beaucoup d’une école à l’autre (8). Certaines écoles donnent leur diplôme suite à un clinicat ou suite à un projet de recherche. L’objectif de cette mini revue est de comptabiliser les écoles d’ostéopathie au Québec et de faire une revue de la littérature sur la publication découlant des projets de recherche issue de ces écoles.

Méthodes

La recherche documentaire s’est faite en trois parties.
– La première partie consiste à répertorier les écoles d’ostéopathie via le moteur de recherche Google, seulement les trois premières pages de la recherche seront prises en considération. Les mots clés utilisés étaient : école d’ostéopathie Montréal, école d’ostéopathie Québec.
– Deuxièmement, selon la disponibilité informatique, le nom des étudiants des écoles d’ostéopathie ayant accompli une recherche sera utilisée afin de trouver leur ouvrage sur les bases de données informatiques. Le titre de leur projet sera également utilisé. Les bases utilisées sont : Pubmed/Medline (1949 à avril 2011), Web of sciences (1979 à avril 2011), the Cochrane librairy (1990 à avril 2011) et Cinhal plus (1937 à 2011).
– La troisième étape est de faire un sommaire de ces études dans un tableau de synthèse.

Critères d’inclusion des articles
Articles publiés dans une revue révisée par des pairs, être disponibles par une recherche sur Internet, être publiés en français et/ou en anglais, nom des auteurs disponibles, recherche originale provenant du Québec en ostéopathie.

Critères d’exclusion des articles
Tous les articles qui ne satisfont pas les critères d’inclusion.

Résultats

Les résultats pour identifier les écoles d’ostéopathie sur Google sont résumés dans le tableau 1.

Tableau 1. École, association, heures de cours et projets d’étude des écoles ostéopathie québécoises.

Une mini-revue de littérature démystifiant le phénomène de l

Le tableau 2 représente les travaux de recherche publiés sur les bases des données électroniques :

Table 2. Publication des travaux de recherche en ostéopathie au Québec.

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Étant donné qu’aucun projet n’a été publié dans les bases de données, il est impossible de synthétiser les recherches dans une revue systématique de la littérature.

Discussion

La littérature scientifique en ostéopathie est très présente avec un total de 6 760 résultats répertoriés avec les mots-clés présentés dans le tableau 3.

Tableau 3. Résultats de recherche sur les bases de données avec les mots clés reliés à l’ostéopathie

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Parmi tous ces articles, aucun ne provient des résultats de recherche des ostéopathes formés au Québec. Il faut cependant noter qu’un article fut publié par une étudiante du Canadian College of Osteopathy (CCO, qui est une filière du CEO en Ontario) dans le Journal of Pediatric Urology en 2008 (9). Cet article a été identifié par une recherche bibliographique manuelle dans le livre de Nathalie Camirand (10). Les étudiants qui terminent leur étude en ostéopathie par le biais du CEO qui a des écoles à Vancouver, Halifax, Toronto et Winnipeg ne peuvent pas utiliser le titre de D.O. étant donné que ce titre est protégé par ceux ayant une formation médicale américaine, ils utilisent alors le titre de (diplôme en ostéopathie de praticien manuel) DOMP. Étant donné que cet article n’était pas disponible dans le processus de recherche, celle-ci n’a pas été comptabilisée. La majorité des projets de recherches des écoles d’ostéopathie sont accessibles en formats papier si l’école veut en autoriser l’accès. La question se pose alors : pourquoi les ostéopathes québécois ne publient pas leurs travaux? Pourquoi les écoles d’ostéopathie obligent à leur étudiant de faire un travail de recherche ? De plus, ces écoles emploient le terme mémoire qui est associé à une maîtrise universitaire et certains emploient même le terme thèse qui est associé à un doctorat. En plus d’utiliser le terme provenant des D.O. américains, les écoles utilisent des termes universitaires de recherche. Habituellement, les recherches sur les humains doivent passer à travers un comité éthique et scientifique d’un lieu de recherche. Ces écoles d’ostéopathie ne rencontrent donc pas les normes éthiques puisque ceux-ci ne possèdent aucun comité de ce genre.

En regardant de près le nombre d’heures réel passé en classe (souvent échelonné sur plusieurs années) qui sont distribuées sous forme de séminaires, on constate en moyenne le calcul suivant : (5 jours de 8 heures échelonnés sur 6 séminaires par année d’étude). Le résultat de ce calcul donne environ 1 200 heures en classe. En comparant avec un programme de coiffure au diplôme d’études professionnel (DEP) reconnu par le gouvernement du Québec, le nombre d’heures passé en classe pour pratiquer ce métier est d’environ 1500 heures (11). Alors, pourquoi échelonner 1200 heures jusqu’à 5 ans. Selon ces faits, il prendrait plus d’heures pour obtenir un DEP qu’un diplôme en ostéopathie. Cela donne une fausse représentation au public lorsque ces gens disent qu’ils ont étudié pendant 5 ans. Habituellement un programme universitaire de 5 ans fait référence à un doctorat de premier cycle comme la chiropractie, la dentisterie ou la médecine. C’est une des principales raisons pourquoi la COA s’attaque aux non-physicians (non- médecin) pratiquant l’ostéopathie au Canada (2).

Chaque école offre une association différente pour leur étudiant. L’office des professions du Québec ne reconnaît pas l’ostéopathie, donc aucune de ces associations ne peut prétendre protéger le public. Il est également intéressant de constater que sur le site du registre des ostéopathes du Québec (ROC) qu’une contre-indication de l’ostéopathie peut être les ajustements à haute vélocité et faible amplitude (HVLA thrust) qui sont un geste réservé aux chiropraticiens (1). Il est vrai que certaines techniques de chiropractie ressemblent beaucoup à certaines techniques d’ostéopathie, mais au Québec ces techniques sont réservées aux chiropraticiens (12 ,13). Toutefois, ces techniques similaires ne font pas objets de litiges entre les descendants du Dr Still et du Dr Palmer aux États-Unis puisque chacun a leur législation professionnelle. Un dernier point à constater, les écoles québécoises passent beaucoup de temps à enseigner les techniques cranio sacrées et viscérales. Si on regarde les techniques les plus utilisées sur le tableau 4 par les vrais D.O. américains, on constate que ceux-ci utilisent le moins souvent les techniques cranio sacrés et que les techniques viscérales ne sont pas répertoriées (14). La question demeure alors, pourquoi passer plusieurs années à enseigner des techniques plus ou moins validées par la littérature scientifique. Les D.O. américains voulant pratiquer l’ostéopathie dans la sphère crânienne doivent poursuivre des études postdoctorales afin d’obtenir un Fellowship de la cranial academy (15). Par contre les ostéopathes formés au Québec semblent être plongés dès leur début de formation avec cette approche controversée du Dr William Gardner Sutherland (16).

Tableau 4. Techniques les plus utilisées par les D.O. américains selon Johnson (14).

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Conclusion

La formation des ostéopathes au Québec diffère beaucoup d’une école à l’autre. De plus, ces formations n’atteignent pas les standards des D.O. formés aux États-Unis ayant droit de pratique au Canada qui est une formation équivalente à la médecine. Les pseudo recherches faites dans les écoles d’ostéopathie au Québec ne sont pas publiées dans les bases de données électroniques scientifiques et ne rencontrent pas les exigences de publication universitaire. Le public québécois devrait être mieux informé avant de laisser leur soin de santé aux ostéopathes formés au Québec. Après tout, les chiropraticiens possèdent un doctorat et une formation sérieuse en plus d’avoir une excellente connaissance de la thérapie manuelle. Il serait donc important de prendre des mesures adéquates afin d’arrêter la confusion qui s’est installée au Québec concernant l’ostéopathie.

Remerciement et subvention
Aucun

Références

1. Registre des ostéopathes du Québec, définition, http://www.registre.org/osteopathie.html
2. Canadian osteopathic association, osteopathic practice in Canada. http://www.osteopathic.ca/documents.htm
3. American osteopathic association, what is a D.O.? http://www.osteopathic.org/osteopathic-health/about-dos/what-is-a-do/Pages/default.aspx
4. Emil P. Lesho,D.O. (1999), An overview of osteopathic Medecine, Arch Fam Med, vol. 8, p. 477- 484.
5. Licciardonne et coll. (2007), A comparation of patients visits to osteopathic and allopathic general and family medicine physicians: results from the national abulatory medical care survey: 2003-2004, Osteopathic medicine and primary care 1:2.
6. Collège des Médecins du Québec, règlement sur les conditions et modalités de délivrance du permis et des certificats de spécialistes du CMQ, http://www.cmq.org/MedecinsMembres/DossierMembreFormulaires/NouvSpecialites/~/media/D9BBA4A8BE0046F1A3F4F9AB3B33DBB9.ashx?111030
7. . G. Jude Shadday D.O. et coll. (1988), The progression of osteopathic medicine internationally: A survey of American trained Dos practicing abroad, JAOA, vol. 88, no.9, p. 1095-1098.
8. Site du Ministère de l’Éducation et des loisirs du Québec, http://www.mels.gouv.qc.ca/
9. Nemett, D. R., Fivush, B. A., Mathews, R., Camirand, N., Eldridge, M. A., Finney, K., & Gerson, A. C. (2008). A randomized controlled trial of the effectiveness of osteopathy-based manual physical therapy in treating pediatric dysfunctional voiding. J Pediatr Urol, 4(2), 100-106
10. Camirand, Nathalie, Dysfonctions glandulaires et nerveuses, diagnostics et traitements ostéopathiques, Maloine, 2009, page III.
11. École Pierre dupuy, http://www.pierredupuy.qc.ca/visiteur/programmes/coiffure.html
12. Gouvernement du Québec, Loi sur la pratique de la chiropractie, http://www2.publicationsduquebec.gouv.qc.ca/dynamicSearch/telecharge.php?type=2&file=/C_16/C16.HTM
13. Gleberzon, B. J. (2004). Does chiropractic "add years to life"? J Can Chiropr Assoc, 48(4), 305-306.
14. Shirlley M. Johnson, Ph. D. et coll. (2003), Osteopathic manipulative treatment techniques preferred by contaporary osteopathic physician, JAOA vol. 103 no. 5, p. 219-224.
15. Cranial Academy, site web officiel, http://www.cranialacademy.com
16. Upledger, J. E. (1995). Craniosacral therapy. Phys Ther, 75(4), 328-330.

Article soumis le 13/11/2011 et accepté le 21/11/2011

Auteur

François Lalonde, Doctorant
Département de kinésiologie
Faculté des études supérieures et postdoctorales
Université de Montréal